Les histoires du Welcome Hotel
Un lieu chargé d'histoire
Le Welcome Hotel a su traverser les âges et garder en son sein de nombreuses histoires toutes plus intéressantes les unes que les autres.
Retracez l’histoire du Welcome Hotel vieux de plus de 100 ans, découvrez les artistes iconiques ayant fait de cet hôtel un lieu comme nulle part ailleurs, redécouvrez également la pièce « le testament d’Orphée » du célèbre Jean Cocteau figure emblématique du Welcome Hotel.
Le Welcome Hotel à travers les âges
La naissance d'un village
La rade de Villefranche, à l’abri des vents et des courants, a servi de port pour les navires grecs et romains depuis l’Antiquité sous le nom d’Oliva Portus.
Le comte de Provence, Charles II, conscient de l’importance stratégique de la rade, fonde Villefranche en 1295.
Afin d’inciter les habitants qui s’étaient réfugiés dans les hauteurs à s’installer sur la côte, le comte leur assure protection (remparts, tours) et les exonère de taxes : Villa Franca est née.
Au XVIè siècle, le village recevra la visite du Pape Paul III, de François 1er, de Charles Quint.
Villa franca devient un point stratégique militaire qu’il convient de fortifier afin de contrer les attaques de la flotte franco-turque qui tente de l’envahir.
Ainsi, la Citadelle, le Mont Alban, le fort de Saint Hospice sont érigés pour défendre le Comté. Le port de la Darse, port privé du Duc de Savoie est également créé. Réaménagé, il deviendra un Port royal au XVIIIe siècle.
Villefranche recevra également l’Empereur Napoléon III et des présidents de la République comme Sadi Carnot.
Le bâtiment qui deviendra le Welcome Hotel est édifié en 1710, 35 ans avant la construction du port de Nice qui fait perdre de son importance à celui de Villefranche. En avril 1860, le Comté de Nice est annexé par la France.
Villefranche va alors développer son port commercial et devenir enfin un paisible petit village de pêcheurs.
L'âge d'or
En 1864, la voie ferrée arrive jusqu’à Villefranche, reliant ainsi le village à la capitale. La Reine Victoria, le Tsar et la Tsarine, le Roi des Belges viennent y passer leurs vacances.
Au lendemain de la Première Guerre Mondiale, la bourgeoisie remplace l’aristocratie. Villefranche renaît, offrant aux pêcheurs, marins, artistes et plaisanciers, un lieu pittoresque et chaleureux dans la plus belle rade du monde.
A la même époque l’US Navy, qui fera plus tard de la rade de Villefranche sa base officielle Européenne, commence à rythmer la vie de Villefranche.
Sur le quai, les filles attendent l’arrivée des marins qui viennent trinquer au Welcome Bar ou chez la mère Germaine jusqu’au lever du jour. Les épouses des amiraux et officiers y résident de manière permanente.
A l’aube, un léger silence s’empare de Villefranche le temps d’un instant, avant que les pêcheurs ne reprennent leurs activités. Etalage de filets autour de discussions de société et de politique, qui finissent forcément en disputes.
Les jours passent, marins et villageois partagent rires et moments de complicité jusqu’à ce que la France quitte le Commandement intégré de l’OTAN en 1967. Cependant, l’US Navy continue à rendre visite aux Villefranchois régulièrement.
Une période Rock N Roll
Au printemps 1971 arrivent les Rolling Stones qui fuient le fisc du Royaume-Uni. Keith Richards loue la Villa Nellcote, au cœur de la rade de Villefranche. Le sous-sol de la célèbre villa devient un studio où ils commencent à enregistrer leur célèbre album « Exile On Main Street ».
Avec eux, un énorme trafic de drogues en tous genres s’installe, attirant des personnages peu recommandables. Comme le disait Cocteau, Villefranche devient un lieu où « les petites gens prennent exemple sur les gangsters », bien qu’évidemment, l’âme de Villefranche fasse toujours rêver artistes et vacanciers.
La Villa Nellcote était ouverte aux quatre vents. Un jour, des cambrioleurs sont sortis par la porte d’entrée avec neuf des guitares de Richards, le saxophone de Bobby Keys et la basse de Bill Wyman.
Mick Jagger se marie à St Tropez. Presse internationale et célèbres stars de la pop affluent alors sur la côte pour assister à l’évènement. Les célébrations se poursuivirent pendant une semaine à la Villa Nellcote. Le groupe quitte la villa à l’automne à la suite d’une descente de police : en 1973, Keith Richards sera reconnu coupable de trafic de drogue et aura interdiction d’entrer en France pour deux ans.
La Saga Familiale
Une bâtisse au cœur de l’âme de Villefranche
Avant d’être un hôtel, la bâtisse accueillait déjà des voyageurs. À l’époque, on les nommait pèlerins et l’hôtel abritait un couvent. La partie la plus ancienne de l’immeuble date du XIII° siècle, soit de la même date que la rue Obscure (la partie nord-est au rez-de-quai est constituée d’une voûte dont les piètements mesurent un mètre de large).
On dit aussi qu’avant cela le bâtiment abritait une garnison.
On apprend dans un courrier de 1956, que l’édifice avec ses 4 niveaux date de 1710.
En 1787, il devient officiellement un hôtel sous l’appellation « Hôtel, bar, café de l’Univers » et vers 1890, un quatrième étage est ajouté. En 1956, deux autres étages sont construits dont un mansardé, ainsi qu’un ascenseur.
Jusque dans les années 20, l’activité de l’établissement se résume aux visites des familles des villageois et aux quelques aventuriers en transit.
En 1920, les Anglais étant devenus les amis inconditionnels de la Côte d’Azur, l’hôtel de l’Univers devient l’Hôtel Welcome, un lieu hors du temps.
Très vite, autour des années 30, le tourisme évolue. Les congés payés et les croisières se démocratisent et attirent une nouvelle catégorie de vacanciers. Le tourisme se développe.
Les Galbois et l'hôtellerie
En 1938 Guy et Reine Galbois dirigent l’hôtel Mondial à Vichy.
Durant la France de Vichy, Guy, fils de gendarme et résistant, prend le nom de code « Rollier ».
Gérant de l’immeuble devenu ministère de l’agriculture, il a les clefs de toutes les pièces et fournit des renseignements à la Résistance.
L’échec de sa dernière mission, qui avait pour finalité l’enlèvement et l’extradition en Angleterre du maréchal Pétain, oblige « Rollier », démasqué, à fuir avec femme et enfants.
En 1943, Platon Sylvestre, le père de Reine Galbois, acquiert le Welcome Hotel.
Deux semaines plus tard, l’armée allemande fait exploser 7 mines autour de l’hôtel afin de le rendre inutilisable par les alliés. Heureusement, le bâtiment reste debout grâce à l’épaisseur de ses murs
Il faudra deux ans pour remettre l’établissement, pillé et délabré, d’aplomb.
À force de travail et de bonne volonté, le Welcome Hotel parvient à changer son image et la clientèle qui vient en ces lieux en quête de calme, de raffinement et d’un service irréprochable.
Français, Anglais, Belges ; auteurs, cinéastes, industriels, couturiers… Le Welcome Hotel récolte les éloges du monde entier
L'arrivée de Gérard Galbois
En 1971, après de longues années dévouées à son établissement, Guy décède d’une crise cardiaque, laissant sa femme Reine seule aux commandes.
Gérard, le dernier des trois enfants, alors âgé de 26 ans, vient épauler sa mère.
La tâche fut délicate, et ses débuts n’ont pas été sans embûche.
Pendant près de 50 ans Gérard va donner au Welcome l’envergure que l’on connait aujourd’hui.
Sa formation d’ingénieur en travaux publics lui permet de mener les rénovations nécessaires pour embellir les lieux au fil des années.
Il se rend compte rapidement que le plus important pour un Hôtelier Restaurateur est de s’entourer d’une équipe de professionnels passionnés, ce qui lui permet de hausser le standing de l’hôtel.
Extrêmement engagé dans les diverses instances patronales et institutionnelles locales, il se voit remettre en 1997, par le Sénateur Maire de Saint Jean Cap Ferrat, la médaille du tourisme.
Jusqu’en 2000, en plus de l’hôtel, Gérard gère deux restaurants : un restaurant gastronomique ouvert en 1974, Le Saint Pierre qui était situé dans l’actuelle réception ; et un bistrot sur la place attenante, le Carpe Diem ouvert en 1984.
Le Welcome au XXIè siècle
En 2000-2001, Gérard arrête définitivement la restauration, pour se consacrer entièrement à l’hôtel. Il engage des travaux pour installer la réception au niveau des quais ainsi qu’un hall d’accueil et un salon. La véranda sert de salle de petit déjeuner ainsi que de bar : le Wine Pier ouvre en 2002. Quatre chambres supplémentaires et une junior suite sont créées.
Au début des année deux mille, il entreprend une démarche qualité, inédite pour un établissement de cette taille et obtient la certification ISO 9001, preuve de son engagement pour une haute qualité de service et pour un environnement de travail qui évolue toujours vers plus de professionnalisme.
Toujours en quête de performance il décroche sa 4eme étoile en 2010
En 2016, son fils Charles reprend la direction de l’établissement. L’hôtel entre dans une nouvelle ère avec de nouveaux défis qui attendent la quatrième génération de propriétaires exploitants de cette institution familiale.
Pourtant Charles Galbois s’évertue à faire perdurer les valeurs qui lui ont été transmises : le plaisir d’accueillir et la qualité de service. Pour cela, le Welcome Hotel ne cesse de se réinventer et se mue dans une perpétuelle rénovation.
L’objectif reste inchangé : faire vivre à nos hôtes une expérience unique, au cœur de la Côte d’Azur.
Les artistes et le Welcome
Cocteau et le Welcome Hotel
Dans les années 1920, le Welcome, attire les artistes aux esprits libres. Jean Cocteau vient s’y reposer après la mort de son grand amour, l’écrivain Raymond Radiguet, survenue le 12 décembre 1923. Les frères Vigouroux, alors propriétaires de l’hôtel, deviennent ses premiers mécènes et accueillent l’artiste de nombreuses fois.
Villefranche était son second domicile. Jean Cocteau citait souvent le Welcome dans ses livres et ses articles.
D’ailleurs, dans un de ses livres, “La difficulté d’être” (1946) on peut lire : « Un hôtel hanté fut l’Hôtel Welcome à Villefranche. Il est vrai que nous le hantâmes, car rien ne l’y prédisposait. Il y avait bien la rue couverte. Il y avait bien les remparts et la caserne qui, le soir, évoque les absurdes magnificences du rêve. Il y avait bien à gauche Nice, à droite Monte-Carlo, et leurs architectures sournoises. Mais l’Hôtel Welcome était simplement charmant et paraissait n’avoir rien à craindre. Ses chambres étaient peintes au ripolin. On avait passé une couche de peinture jaune sur les trompe-l’œil à l’italienne de sa façade. Le golfe abritait les escadres. Les pêcheurs réparaient les filets et dormaient au soleil… »
Le défilé des grands de ce monde
Cocteau, Picasso, l’égérie des peintres Kiki de Montparnasse, la célèbre danseuse Isadora Duncan, les artistes du monde entier viennent s’imprégner et s’inspirer de l’atmosphère unique du village !
Dans “La difficulté d’être”, Jean Cocteau écrit encore :
Nos chambres devinrent, ainsi que dans le Sang d’un poète, des loges de théâtre d’où nous assistâmes désormais au spectacle des batailles entre les marins des unités françaises, anglaises, américaines. Christian Bérard, Georges Hugnet, Glenway Wescott, Mary Butts, Monroe Wheeler, Philippe Lassell habitèrent l’hôtel. On dessina, on inventa, on se visita de chambre en chambre. Il naissait une Mythologie dont Orphée résume le style. Stravinsky habitait Mont Boron. Je lui portais les textes latins d’Œdipus Rex. Il composait l’oratorio au fur et à mesure. L’hôtel se peuplait de ces invisibles qui viennent quand ils veulent et nous surveillent. Ils y mirent le drame, le vertige, le feu sacré.»
L'héritage Jean Cocteau
Jean Cocteau occupait l’actuelle chambre 22 (redécorée expressément en hommage au poète-graphique). Cela est établi par la reproduction d’une carte postale qu’il envoya à sa mère et où il entoura la fenêtre de sa chambre. Selon les confidences de l’ancien propriétaire, le « poète de tous les arts », occupait à titre gratuit, deux chambres : l’une officielle, la chambre 22, où il se trouvait normalement (surtout lors de contrôle de police) et l’autre où les odeurs de fumée d’opium ne devaient pas être humées par la maréchaussée.
Il réalise au Welcome quelques dessins dont ceux des Mystères de Jean l’oiseleur (1925).
En 1950, il entreprend de faire la décoration des murs de la Villa Santo Sospir à Saint Jean Cap Ferrat et Francine Weisweiller devient son mécène, mais il continue de parler du Welcome.
En 1956, il décore la chapelle Saint-Pierre située à proximité de l’hôtel.
Il a laissé à Guy Galbois un dessin (reproduit sur une mosaïque à l’entrée de l’hôtel) ainsi qu’une dédicace :« À mon très cher Welcome, où j’ai passé le meilleur de ma vie » – Jean Cocteau 1957 »
Quelques citations
« J’habite un endroit bizarre, l’Hôtel Welcome, une boîte complètement suspendue aux dernières branches d’un arbre de Noël étincelant…»
1926 Lettres de Jean Cocteau à Marcel Jouhandeau
« Maman chérie, Villefranche est une merveille avec ses navires, ses coups de canons, ses hymnes, ses jazz. Cette vie excessive me déborde et je la regarde sagement de ma chambre comme d’une loge d’opéra »
1925 Lettre de Jean Cocteau à sa mère
« Ici même, à Villefranche, chaque soir, je m’assieds seul sur le port. La routine est douce. Une étoile s’allume à droite, une autre va s’allumer au-dessus de Saint-Jean.
Je connais bien l’ordre dans lequel s’allument les étoiles ; entre la première et la seconde un vieux passe avec une chèvre en laisse. Les barques s’entrechoquent, le phare promène son porte-voix sur la mer ».
1926
Quand je regarde Villefranche je vois ma jeunesse, fassent les hommes qu’elle ne change jamais
1952
De temps en temps, il faut se reposer de ne rien faire